In memoriam
(
à Nicole )
Le
vent découpé par les bras lents d’éoliennes
ployait
avec peine les champs de maïs roussis
des
vastes étendues rouvertes aux charrues.
Au
bord des longs chemins de grands chardons secs
dont
les couleurs coulaient encore sur la pierre usée
tendaient
leurs rets griffus sous les tambours du ciel
-
tapis au plus profond de lourdes nuées sombres -
avec
l’espoir désuet de retenir le temps
d’un
instant d‘évasion, d’une simple illusion.
Mais
pour toute la Nature, inexorablement
l’automne
se dissolvait dans l’hiver naissant…
Bien
sûr un corps s’en va, oméga vers alpha
Parmi
tous les soupirs ton dernier fut le pire
Quand ta vie s’envola et de toi nous priva
Nous reste ton sourire qui lui ne peut mourir
***
Le
brouillard est très dense.
Il
efface tout.
C’est
peut-être çà la mort :
ce
passant solitaire qui s’estompe lentement
dans
un repli de l’univers
où
se dissimulent les étoiles englouties,
dans
cette solitude aux dimensions élastiques
des
espaces sabordés en fragments tressés.
Collisions
des échanges
et
de l’imprévu des imitations infidèles.
Rythme
immuable des oscillations motiles de la vie,
focale
analgésique de molécules gorgées d’atomes avides.
Images
flash d’un cache-cache trash.
Lumières
crues de la ville
effaceuse
des panoramas de la nuit,
ces
questions éternelles laissées sans réponse.
***
Au labyrinthe
absurde
de l’incompréhensible
sous
un soleil aux rayons lourds de chaleur en conserve
chaque
ombre marche
dans
la poussière rouge des attraits du monde
levée
par les sept couleurs du vent.
Vivre
longtemps dans ses rêves
les
assauts victorieux
des
sphères d’arabesques
les
plus inaccessibles
avant
de survivre dans les souvenirs
puis,
avec
la superbe des destins ordinaires
frapper
à la porte des étoiles.
***
La
vie tombe en des tombes saturées
d’un
air chargé de derniers souffles
mêlés
en un dialogue de fantômes
démiurges
des étoiles de mort
qui
envahissent le ciel
attendant
dans un silence obscur
à
la couleur de défunts fœtus
le
signal pour s’écraser sur terre
en
une longue pluie d’ombres
comme
averse de pierres,
où
neige a posé son voile,
sur
un corps de syrte.
***
Discuter
avec la nuit
Par
la grâce du rêve,
chaque
nuit
mon
identité resurgie
extirpe
de moi l’animal social
formaté
par l’ennui
et
je retrouve alors mon origine :
comment
démasquer le coupable de l’absurdité ?
pourquoi
êtes vous tous aussi morts ?
et
le temps glisse-t-il sur les pentes du présent ?
et
dans le boui-boui d’Albert,
l’ange
pleure-t-il toujours dans son verre ?
et
est-ce que les galets mouillés pensent ?
…
la vie me parle-t-elle encore ?
Passe-moi
tes mots pour discuter avec la nuit !
***
et
le bruit du ressac
impact
et matraque
les
fadaises de fado fatigué
des
pistes
audios,
&
des vidéos
pornos
Ici
pas de listes
seulement
le chant de l’air
seulement
le chant de l’eau
même
parfois il fait beau
même
parfois tout est clair
Mon
ombre y marche seule
quand
je pleure dans mon verre
sur
ce qu’ils souhaitent en faire
pour
taire ce qu’ils en veulent
pour
ne pas dire un mot (ni petit, ni moyen, ni gros)
qui
plaise à ces menteurs
et
au leurre des heures
ravaler
tous ces maux (ni petits, ni moyens, ni gros)
car
le secret du temps
est
qu’il n’existe pas
Voilà
pourquoi
ici et maintenant (ou ailleurs et demain,
cela
n'a pas d'importance)
la
mer m’apaise
et le bruit du ressac …
***
Le
crayon raye le papier,
rapide,
le
griffe de traits durs, droits,
enchevêtrés,
de
lignes brisées,
de
quelques orbes,
tout
ça mêlé.
Gribouillage,
Griffonnage
? Non.
Une
tête est en train de prendre forme,
celle
d’une femme sans doute…
Une
femme, oui. D’allure noble,
portant
haute coiffe
semblable
à celles des beautés h’Mong des hauts plateaux du Siam.
Les
cheveux raides sortent du piège de la coiffe,
sans
ordre précis, telle une horde trop longtemps contrainte
et
vont heurter plutôt qu’effleurer le haut col de la robe de lainage
–
ou bien est-ce un empilement d’anneaux ? -
puis
assagis, assouplis soudain,
vont
couler sur les revers de ce qui doit être un manteau
ou
une cape - un châle peut-être ? -.
Le
visage reste une plage blanche.
Quelques
allers retours du crayon…
un
regard paraît,
l’ébauche
d’un nez, l’esquisse d’une bouche.
Le
crayon cesse son ballet, roule sur la table loin du papier
laissant
là la princesse d’un rêve éveillé
dans
les premières secondes d’une nouvelle année…
une
main fine discerne la feuille abandonnée,
un
regard caresse le dessin,
un
sourire glisse sur des lèvres puis,
la
feuille retombe doucement sur la table.
***